le 14 septembre 2022
La ruralité n’est pas à vous.
Designers des grandes villes, startupers, entrepreneurs de la tech, après avoir fait semblant de vous intéresser à l’éthique et à la santé, vous vous intéressez maintenant à la campagne que vous appelez « ruralité ».
Le rural c’est la nouvelle tendance.
Vous objectifiez le rural, comme le nouveau sujet de votre divertissement, comme la promesse d’être à la mode tout en restant proche de votre confort : Uber, « petits producteurs en biodynamie », Deliveroo, JustEat, Naturalia, Veja…
Vos mots trahissent votre prétention :
« Le design a un rôle majeur à jouer en milieu rural »; « il faut numériser le milieu rural et redynamiser les territoires »; « le designer est un ressourceur qui révèle les pépites cachées des territoires »; « la ruralité est une startup qui s’ignore. »
Selon vous, il faut « réduire la fracture numérique » et importer vos « formes de convivialité » avec la volonté de « réinventer nos façons de vivre »;
Vous nous appelez « les acteurs du territoire » et réfléchissez à « ce que le design peut apporter à la ruralité… ».
Ces expressions sont issues de vos programmes de recherche, de vos workshops parisiens et citadins qui transpirent la culpabilité environnementale en plus d’un espoir de rédemption.
Gardez vos tiers-lieux et vos collectifs.
Votre volonté d’investir la campagne, d’y installer vos résidences, vos collectifs, vos tiers-lieux, tout en disposant de la fibre optique et du confort citadin cache difficilement votre désir de vous acheter un ticket d’embarquement lorsqu’il sera temps de fuir la ville.
Votre volonté de numériser la ruralité est un moyen de trouver de nouveaux marchés économiques et de mettre un monde qui vous échappe encore, au rythme effréné de la production et de la consommation.
Debout dans la boue.
Si votre design et vos créations ne sont pas de nature radicale et violente, ils ne sont qu’une façon de retarder l’implosion avec de belles rustines.
Nous, ruraux, radicaux, nous ne vous attendons pas,
nous avançons, debout, dans la boue.
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le 22 septembre 2022
Les réactions suite à notre texte :
La forme avant le fond :
@Torpor02147112 : "Choix typo tout droit sorti d'une école de design, certainement les pied dans la boue. Il y en a qui aiment se faire caca dans la bouche."
@MaisOuVaLeWeb : "Vu le soin apporté aux marges, aux polices de caractère et globalement à l'aspect punchy de l'affiche, je serais pas surpris qu'un designer l'ait conçue."
@ElliotLepers : "mdr des césures sur un texte en drapeau, c’est vraiment pas mon genre… et puis bon Commune c’était à la mode en 2017 hein"
@romBeaucher : "Faut vraiment être un urbain pour écrire "debout dans la boue" en gros"
@Marion_HR : "Très paradoxal de dénoncer une pratique en utilisant ses codes et son langage... [...]"
D'autres réactions :
@designonethique : "Toujours dur à entendre pour le design qu'il peut ne pas être le bienvenu quelque part."
@Torpor02147112 : "Si non ça a le mérite de troller sévère et de poser 3 bonnes questions. - C'est quoi la ruralité, c'est qui, quelle définition sociologique ? - Quelle place pour quel design ? - Quid du colonialisme socio-culturel ? Valable ici et ailleurs."
@julienbidoret : "[...] je ne crois pas être le seul à avoir été assez mal à l'aise en voyant un master “design des mondes ruraux” installé par l'Ensad à Nontron)."
@julienbidoret "il y a un réel enjeu de colonisation du langage par un vocabulaire manipulé sans grande précaution par le champ du design."
@julienbidoret : "À juste titre, @designonethique signale la valeur, la légitimité (voire la nécessité) de paroles sans nuances, raides et brutales."
à suivre...